mardi 20 septembre 2016

Un été bien silencieux


Depuis le milieu du printemps la filière porcine est bien silencieuse. Ce qui change des manifestations violentes et déclarations enflammées du début de l’année, des Bonnets Roses et des invectives entre représentants des éleveurs et ceux des industriels, de la grande distribution et du gouvernement.

Chacun y allait alors de sa déclaration, de sa solution, préconisant qui la massification de l’offre, qui la réforme du marché du porc breton, qui la mise en avant du porc français, qui la baisse des charges tout en sauvegardant le modèle social français ( ?), qui l’étiquetage obligatoire, etc…. il suffit de consulter la presse professionnelle de cette époque pour retrouver le florilège de propositions diverses, souvent contradictoires et démagogiques.

Il est vrai que l’amont de la profession, les éleveurs, étaient aux abois avec un cours au MPB désespérément très bas et des animaux de plus en plus lourds dans les élevages, et des industriels qui ne se portaient dans l’ensemble pas beaucoup mieux, sur un marché en profond déséquilibre offre/demande, une agressivité espagnole portant autant sur les quantités que sur les prix, la concurrence des abattoirs et transformateurs allemands, etc…

Que c’est- il donc passé ?

C'est bien une forte demande asiatique, surtout chinoise, qui a permis d'éponger le marché européen de ses excédents et, ipso-facto, fait remonté les cours dans tous les pays, jusqu’à un niveau qui n’avait pas été atteint depuis plus de deux ans. Ce lundi 19 septembre, le cours TMP 56 était de 1, 528 € le kg/carcasse, soit plus de 1,75 € payé à l’éleveur, avec un poids moyen de carcasse de 93,1 kg, soit 700 grammes de moins que l’année dernière à même date, selon le directeur du MPB.

Souvent les cours recommencent à descendre à la fin de l’été, jusqu’à la fin de l’année. Ce n’est pas le cas cette année, du moins pour l’instant, et la demande asiatique semble ferme.

Cette embellie est vraiment la bienvenue et va sans doute permettre à nombre d’éleveurs de souffler un peu. Mais sans vouloir faire le rabat-joie, cette amélioration n’est pas venue de la mise en place des mesures demandées au paroxysme de la crise (à l’exception peut-être de la mise en avant du porc français), mais d’une demande à l’exportation qui ressemble plus à une aubaine qu’à une action construite sur le long terme.

Remarquons d’abord que ce sont les espagnols et les allemands qui ont été à l’offensive sur le marché asiatique pendant que les français s’étripaient entre eux. Cela se voit aux résultats :
Si la France a augmenté de 200% ses exportations de viandes de porc fraîches et congelées vers la Chine entre janvier et juin 2016 par rapport à 2015, le tonnage n’est que de 43 000 tonnes contre 153 000 tonnes pour l’Allemagne, 135 000 pour l’Espagne, 83 000 pour le Danemark et 51 000 pour les Pays Bas.

La France souffre encore d’une baisse régulière de production alors que l’Espagne augmente la sienne, ce qui a du reste contribué à alimenter le déséquilibre du marché ces deux dernières années (depuis la fermeture du marché russe).

La remontée des cours est donc surtout imputable au dynamisme de nos principaux concurrents européens.

Les questions soulevées avant cette embellie concernant la structure et la compétitivité de la filière, la largeur et la qualité de l’offre, la performance des abattoirs, etc…. sont toujours devant nous.

Un exemple : dans une interview donnée au magazine Linéaire de septembre 2016, Robert Velut, président de la FICT (les industriels de la charcuterie), soulignait qu’il y avait une demande pour 60 000 tonnes de charcuterie bio alors qu’on ne trouve que 10 000 tonnes de viandes bio en France….

Espérons que les chinois nous laisseront assez de temps pour améliorer notre offre et reconquérir notre marché intérieur de plus en plus déficitaire avant qu’eux même ne changent d’avis et diminuent leur demande !

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