L’épidémie COVID19 a mis en
évidence la nécessité (et le souhait) de relocaliser une grande partie de la
chaine alimentaire : autant que faire se peut, se fournir au plus près de
chez soi, au travers de filières courtes, tant pour des questions de sécurité
d’approvisionnement qu’environnementales : diminution des transports,
réduction des moyens de conditionnement et de conservation, etc…
Une autre tendance, un peu plus
ancienne, consiste à privilégier des produits régionaux, typés, sains,
respectueux du bien-être animal pour les produits d’origine animale, etc…
En ce qui concerne la filière
porcine, force est de constater que cette relocalisation est nécessaire, y
compris au niveau intra-national pour ces produits de grande consommation :
Les quatre cartes suivantes soulignent
un très grand déséquilibre entre l’ouest de la France, qui abrite plus de 75 %
de la production porcine, la quasi-totalité des grands abattoirs, et 54% des
activités de transformation, et le reste du pays
Il n’en a cependant pas toujours
été comme cela :
La carte si dessous, issue d’un
ouvrage de A. Leroy, « Le Porc », paru chez Hachette en 1937, montre
une activité d’élevage porcin assez harmonieusement répartie sur tout le
territoire.
C’est à partir des années 1960
que la Bretagne, surtout, a massivement investi dans des élevages intensifs hors-sol,
alimentés par des mais et sojas américains débarqués massivement dans ses
ports, et concurrencé de ce fait les élevages porcins de l’intérieur du pays
avec comme résultat une très forte concentration régionale sur l’ouest et la
constitution d’un désert porcin partout ailleurs, comme l’indiquent ces troiscartes (sources: IFIP, le porc par les chiffres 2019):
Les activités charcutières et
salaisonnières, souvent très liées à l’image d’un terroir ou d’une région
(Jambon d’Auvergne ou de Savoie, Rosette de Lyon, Andouillette de Troyes, charcuteries
d’Alsace,, etc…) n’ont eu le choix qu’entre deux mauvaises solutions : soit
délocaliser la transformation en Bretagne, généralement pour fabriquer des
produits très génériques comme le jambon cuit, le pâté « de campagne »
ou les saucisses « knack », tel par exemple Olida qui a quitté le
département de la Loire pour Loudéac dans les années 80, soit élaborer les
spécialités locales avec des viandes bretonnes, espagnoles ou allemandes, ce
qui obère souvent toute possibilité de promouvoir de façon crédible un signe de qualité lié à l'appartenance à un terroir.
Le résultat, là encore, fut la diminution
progressive d’activités charcutières et salaisonnières prestigieuses, la perte d’image
et de parts de marché au bénéfice de concurrents espagnols et italiens, sur le
marché français mais aussi, et surtout, international.
La relance de filières locales
élevage-abattage-découpe-transformation-consommation, source de dynamisme et d’emploi
local, ne peut être envisagée sans une action énergique des pouvoirs publics
nationaux, mais surtout locaux : régions, départements, communautés de communes.
Il s’agit, de plus de promouvoir
des méthodes d’élevage ayant recours à d’autres techniques que celles du hors
sol intensif en bâtiment, quasi exclusivement utilisées dans les élevages
français.
Ces techniques permettent certes de
produire de la viande à bas prix, mais souffrent d’une image de plus en plus
dégradée et d’une acceptabilité sociétale de plus en plus compromise : l’annonce
de l’installation d’une porcherie industrielle soulève toujours une levée de
bouclier et entraine d’interminables recours que peu de maires ou de préfets souhaitent
affronter.
Il est donc nécessaire d’expérimenter
et de promouvoir un autre modèle technique et économique, basé sur l’élevage de
plein air extensif, éventuellement lié à des techniques d'agroforesterie, tel qu’il est pratiqué par un certain nombre d’éleveurs qui
pour la plupart transforment et commercialisent en vente directe, à la ferme,
sur les marchés ou en magasins de producteurs.
Pour l’instant, ce modèle ne permet pas d’alimenter de façon régulière les filières avales, bouchers, charcutiers-salaisonniers artisanaux ou industriels et distributeurs, qui constituent le gros des canaux de distribution et, à travers eux, des marchés, surtout en milieu urbain où se trouvent l’essentiel des consommateurs.
Ces producteurs sont trop peu
nombreux, trop divers dans leurs pratiques, trop dispersés géographiquement et
pas du tout organisés pour répondre efficacement à cette demande, même de
proximité.
Leur pratique de vente directe ne conduit en outre pas à construire les nécessaires solidarités de filières locales ou régionales.
Leur pratique de vente directe ne conduit en outre pas à construire les nécessaires solidarités de filières locales ou régionales.
Par exemple, la région Auvergne
Rhône Alpes rassemble 7,8 millions d’habitants. Avec une consommation moyenne
de 33 kg de viande de porc par an (certes, avec os !) et par habitant,
ceux-ci absorbent chaque année 257 000 tonnes pour une production locale
de 85 000 tonnes, soit un déficit structurel de 172 000 tonnes, soit
encore 2 millions de porcs charcutiers….
De plus, la région abrite aussi
des activités de transformation qui « exportent » sur toute la France,
et même ailleurs, comme Jambon d’Aoste ou Justin Bridoux, pour ne citer que les
plus connues nationalement, ce qui augmente le besoin régional, difficile cependant
à évaluer au niveau quantitatif.
Pour répondre, ne serait-ce que
partiellement, à cette demande il est possible de promouvoir l’élevage de plein
air en liberté, installé dans les très vastes espaces en déprise agricole et
humaine, friches, landes, forêts, etc… que l’on rencontre un peu partout en France,
et surtout sur cette fameuse « diagonale du vide » qui s’étend des
Ardennes aux Pyrénées.
L’installation de ce type d’élevages
entretien les sols et les paysages, crée des emplois directs et indirects et peuvent
aussi apporter des activités de compléments à des exploitations existantes d’élevage
ou de culture.
Ces élevages auront en outre besoin d'aliments: orge, blé mais, pois féverole, luzerne, etc... qui doivent être de production locale ou régionale.
Ces élevages auront en outre besoin d'aliments: orge, blé mais, pois féverole, luzerne, etc... qui doivent être de production locale ou régionale.
Les collectivités locales,
souvent propriétaires de bois et forêts qu’elles peinent à entretenir pourraient
ainsi permettre l’installation de nouveaux éleveurs pour un investissement
assez réduit (clôtures, abris, nourrisseurs, abreuvoir et petit véhicule de
transport, plus un fonds de roulement), pouvant en outre apporter des activités en aval d’abattage et de transformation. Bref, reconstruire des filières économiques équilibrées et non pas continuellement bousculées par les errements de marchés internationaux des carcasses ou des aliments.
Pour plus de détail, on peut se
rapporter au site de DIV’PORCS AURA :
https://asso-diversiteporcinerhonealpes.blogspot.com/
https://asso-diversiteporcinerhonealpes.blogspot.com/
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