lundi 23 avril 2018

Quelques éléments de géopolitique porcine….



Pourquoi la production porcine française  accuse une baisse régulière alors que la consommation mondiale augmente et que nos principaux compétiteurs européens progressent eux aussi malgré le tassement de leur consommation intérieure ?
Trois grands groupes de pays constituent l’essentiel de l’activité porcine mondiale, à la fois producteurs et consommateurs :
Le groupe asiatique, au premier rang duquel figure la Chine, de très loin premier producteur mondial (la moitié de la production environ) et premier consommateur. La Chine accuse cependant un déficit constant de sa balance porcine et importe de grandes quantités de viande porcine, d’Europe ou d’Amérique . Elle est suivie de loin par des pays essentiellement consommateurs, donc importateurs, le Japon, la Corée du Sud, le Viet-Nam, Hong-Kong, etc…
L’Europe, et plus particulièrement l’UE28, à la fois consommatrice et productrice, est le second producteur et le premier exportateur mondial, à destination surtout de l’Asie.
Elle est sur ce point en compétition ouverte avec le troisième groupe, l’Alena, et surtout les USA et le Canada.
D’autres pays émergent et peuvent devenir à terme des compétiteurs dynamiques et dangereux : l’Ukraine et la Russie , qui disposent d’un fort potentiel céréalier et de protéagineux, l’alimentation de base du porc industriel, d’équipements de plus en plus modernes installés en collaboration avec les grands opérateurs américains, brésiliens et allemands, d’une main d’œuvre bon marché et de contraintes environnementales allégées. Il en est de même du groupe sud-américain, emmené par le Brésil, avec l’Argentine et le Chili.
Tous ces nouveaux opérateurs rêvent d’attaquer  le marché chinois quand ils auront saturé leur marché intérieur, et même avant. La Chine ne peut en effet accroitre fortement sa production, faute de productions vivrières suffisantes, en compétition aussi avec l’alimentation humaine.
La caractéristique commune  de ces nouveaux intervenants est de produire sur des méga-installations, très intégrées, directement liées aux productions locales vivrières céréales-protéagineux, et donc particulièrement compétitives.

Remarquons par ailleurs que  si l’UE 28 est toujours le premier exportateur mondial, c’est surtout grâce au dynamisme des producteurs espagnols, allemands et danois, et plus récemment polonais.
La France, troisième pays producteur de l’UE après l’Allemagne et l’Espagne ne participe que très marginalement à cette activité de grand export et se fait même sévèrement  concurrencer sur son marché intérieur par ses voisins, d’où un  déficit de sa balance commerciale porcine d’environ 300 millions d’euros en 2017.
En misant depuis trop longtemps et uniquement sur la production de porcs standards élevés en batteries hors-sol, avec d’hypothétiques gains de productivité inaccessibles du fait des diverses contraintes sociales et environnementales, de la petite taille des exploitations et de leur faiblesse  financière, en écartant toute réelle montée en gamme qui pourrait être mieux adaptée à la structure familiale  majoritaire dans les élevages français, en écoutant pas l’évolution de la demande des consommateurs ( naturel, local, filière courte, traçabilité, typicité, bien-être animal, etc… ) souvent relayée par les distributeurs et les transformateurs, l’élevage porcin français a perdu pied.