jeudi 10 septembre 2015

Pendant les manifestations, la baisse des cours continue…. et après ?


En dépit d’une faible hausse de 0,2 ct€ lundi dernier et un petit raffermissement du cours allemand, les cours du Marché du Porc Breton (MPB) de Plérin se sont engagés sur une pente baissière depuis les 1,40 € décrétés par le Ministre au milieu du mois d’août. Ce matin jeudi, le cours s’est établi à 1,376 €. Cette tendance devrait malheureusement se poursuivre dans les semaines et les mois qui viennent, probablement jusqu’à la fin de l’année.(Voir article précédent, ci-dessous)

Vouloir maintenir des cours internes à la France déconnectés des cours européens et mondiaux est une utopie qui ne peut plus tromper personne dans une économie européenne volontairement de plus en plus dérégulée.

Les mesures prises, autant en France qu’à Bruxelles, devant la situation catastrophique et la colère manifestée par un nombre important d’éleveurs n’auront sans aucun doute pour effet que de retarder de quelques mois l’inéluctable : l’abandon de l’activité par des centaines, si ce n’est des milliers d’entre eux, avec une répercussion évidente sur les activités avales d’abattage et de transformation, principalement dans l’ouest du pays.

Les souhaits formulés par le Président de la FNSEA, 3 milliards sur 3 ans pour moderniser les bâtiments agricoles, automatiser les abattoirs ou encore renforcer la productivité des exploitations sont bien flous et fortement teintés de démagogie : qui va payer ? L’Etat qui n’a pas d’argent, Bruxelles qui ne le veut pas par idéologie ou les banques qui ne se risqueront pas à prêter à des éleveurs déjà fortement endettés

Le chiffre de 3 milliards, quant à lui, n’est pas fantaisiste. Dans une étude publiée en 2011 (Quels modèles d’élevage d’avenir pour la production porcine française, parue dans Innovation Agronomique n°17) les économistes de l’IFIP évaluaient déjà entre 2,4 et 2,7 milliards les investissements nécessaires à la mise à niveau de compétitivité des élevages français, à mettre en face des quelques 3,5 milliards auxquels on peut évaluer la valeur annuelle de la production de carcasse.

Cela fixe l’ampleur de la tâche et ne fait que souligner le montant dérisoire de l’aide annoncée autant par le Gouvernement (90 millions d’euros/an sur trois ans) que par la Communauté Européenne (rien !).

Les éleveurs sont laissés à eux-mêmes et à leur désespoir, confiés à leurs seuls responsables professionnels eux-mêmes en plein désarrois. Rappelons que la filière porcine emploi environ 30 000 personnes en Bretagne, aux prises aussi avec la crise du lait, du bovin viande et, à moindre niveau, de celle de la filière avicole.

Les réponses apportées montrent que les pouvoirs publics n’ont pas encore pris conscience de la catastrophe annoncée.

Alors que faire ?

D’abord arrêter de se raconter des histoires, ce qui va être le plus difficile.

Puis prendre à bras le corps la reconversion d’une majorité d’éleveurs porcins qui ne peuvent plus rester dans la course et non pas les laisser continuer sous perfusion jusqu’à l’agonie. Cela concerne aussi l’aval de la filière. Les trois milliards annoncés (un peu hâtivement) par le Premier Ministre doivent servir en priorité à cela et non à aider à la survie d’élevages obsolètes.

Ensuite favoriser l’investissement privé (et pas seulement bancaire) dans les élevages qui ont les moyens de s’agrandir et d’atteindre une taille critique pour rester dans la compétitivité européenne.

Enfin engager une politique de filière sur des bases de montée en gamme, de production de haute qualité gustative et environnementale, de relocalisation sur tout le territoire avec comme objectif annexe la reconquête de zones rurales délaissée, etc…

Oui, enfin une véritable politique industrielle prospective qui ne peut être initiée que par les pouvoirs publics, nationaux et régionaux, qui financent plus ou moins directement des cohortes de chercheurs et techniciens de terrain via l’INRA, les Chambres d’Agriculture et de nombreux organismes de soutien qui jusqu’à présent ne font que diffuser la pensée unique et mortifère du porc industriel.

Cette implication des pouvoirs publics doit nécessairement entrainer celle des agents économiques concernés : distributeurs, industriels de l’abattage et de la transformation, fabricants d’aliment, qui devront cesser leur tactique courtermiste et participer à ce redéploiement stratégique qui peut replacer la production porcine française au premier plan, dégager enfin de la valeur ajoutée et contribuer à la croissance et à l'équilibre de la balance du commerce extérieur.

Au travail !

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