samedi 23 janvier 2016

Elever du porc autrement et en vivre ....



 Dans le contexte de crise porcine que l’on subit actuellement, en grande partie imputable à l’hyper-standardisation des pratiques d’élevage et des produits dont ils sont issus, il est utile de mettre l’accent sur les pratiques alternatives et surtout celles dont on ne parle pas, sauf très localement. Celles-ci ont tendance à se développer, même si elles restent très marginales en volume.

Il est cependant  très difficile de se lancer dans une description exhaustive de ce secteur, tant il est divers et protéiforme.

Dans toutes les régions des éleveurs, adeptes très souvent de l’agriculture paysanne de proximité, se sont lancés dans l’élevage porcin, soit à titre principal, assez rarement, soit en complément d’autres activités, de culture ou d’élevage.

La plupart pratiquent la vente directe, avec transformation dite « à la ferme », assez souvent dans des ateliers collectifs. La commercialisation s’effectue à la ferme, sur des marchés, au travers de magasins collectifs, plus rarement par internet, car cela  nécessite obligatoirement de disposer d’un atelier labélisé CE.

Les pratiques, et donc les produits, sont très variables : bio ou pas bio, naisseur-engraisseur ou engraisseur seul, porcs de races locales à croissance lente ou porcs « industriels », plein air extensif ou bâtiments plus ou moins ouverts, sur paille ou sur caillebotis, etc…

La qualité de transformation et la confiance que le consommateur acheteur direct manifeste à l’éleveur valent souvent tous les labels mais peuvent aussi masquer des tromperies…

L’intérêt majeur pour l’éleveur est de récupérer la totalité de la valeur ajoutée : un cochon vendu au prix du marché (mettons 1,30 €/kg carcasse) au charcutier ou à l’abattoir de l’endroit lui rapportera environ 120 euros. Or  il n’est pas rare de valoriser un animal transformé « à la ferme » à environ 1 000 euros, avec des pointes pour du haut de gamme jusqu’à 1 500 €.

Cela mérite donc sérieuse  réflexion….

Car en fait, tout n’est pas facile et, pour un certain nombre de réussite,  nombreux sont ceux qui s’y sont perdu.

En effet, il faut arriver à maîtriser plusieurs métiers :

Optionnels  

-          Cultivateur (pour l’aliment, qui peut cependant être totalement ou partiellement sourcé auprès d’un minotier)

-          Naisseur, métier très technique, qui peut être remplacé par l’achat de porcelets, ce qui limite souvent l’activité à des porcs standards (Large White ou équivalent), l’offre de porcelets en races locales étant souvent très aléatoire.

Obligatoire

-          Eleveur engraisseur

-          Boucher découpeur (qui peut être réglé par l’abattoir)

-          Transformateur (là ou se passe l’essentiel de la valeur ajoutée)

-          Commerçant, quelle qu’en soit la forme.

Ce qui se traduit aussi par un emploi du temps à rallonge et une nécessaire répartition du travail, souvent déjà au sein d’un couple, parfois au sein d’organisations de type GAEC.

Plusieurs difficultés freinent en outre le  développement de ces pratiques :

-          L’accès au foncier, qui est un problème essentiel, même en zone rurale en voie de désertification avancée, et même concernant l’usage de fonciers délaissés, prairies, friches, forêts, qui peuvent servir de parcours pour des élevages extensifs qui pourraient être ainsi réhabilités. Pour des raisons multiples, sur lesquelles nous aurons l’occasion de revenir lors d’un prochain article de blog, les propriétaires fonciers ont fortement tendance à bloquer toute initiative, espérant sans doute que leur terrain sera un jour constructible….

-          L’appui technique. Il y a belle lurette que les chambres d’agricultures et les organisations agricoles ne financent plus de technicien porcin (sauf peut-être en Bretagne…), et que les lycées agricoles ne s’intéressent plus à l’élevage porcin  extensif de plein air. Seuls les organisations d’éleveurs conventionnels et les industriels de l’aliment sont présents, uniquement auprès des éleveurs conventionnels. Les éleveurs atypiques sont donc très souvent livrés à eux même.

-          L’appui financier. Les commissions d’installation et les banques sont généralement très réservées sur des projets de ce genre.

Ajoutons à cela le fait que très souvent ceux qui portent ces activités sont des néo-ruraux, souvent d’un bon niveau de formation mais pas nécessairement en agriculture ni en charcuterie et nous aurons une idée des difficultés qui se dressent devant le développement de cette activité.

La diversité des pratiques, l’individualisme, l’isolement géographique ne poussent pas à la promotion collective de cette activité, ni à sa reconnaissance.

Pourtant l’accueil du consommateur est presque toujours au rendez-vous et nombre de ces producteurs n’arrivent pas à satisfaire la demande.

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